Les deux initiatives populaires «Mieux vivre à la retraite» et «Pour une prévoyance sûre et pérenne» seront portées aux urnes ce dimanche 3 mars. Ces votations font suite à l’acceptation du 25 septembre 2022 par le peuple et les cantons de la votation AVS 21 (stabilisation de l’AVS), concernant un financement additionnel via l’augmentation de la TVA et des modifications de la loi sur l’assurance vieillesse (AVS), notamment par le relèvement de l’âge de référence à 65 ans pour les femmes, en vigueur depuis le 1er janvier 2024.

Moins d’une année et demie plus tard, nous sommes à nouveau appelés à nous prononcer sur une éventuelle augmentation des rentes touchées par les retraités. A la suite de cette nouvelle initiative populaire, les syndicats demandent le versement d’une 13e rente mensuelle aux bénéficiaires de l’assurance vieillesse. Le deuxième objet de votation lancé par les Jeunes PLR «Pour une prévoyance sûre et pérenne» portera sur une proposition visant à fixer l’âge de la retraite à 66 ans.

Tout d’abord, qu’est-ce que l’AVS ?

Pour rappel, l’assurance vieillesse et survivants est une assurance obligatoire pour tous, également connue sous l’acronyme AVS ou premier pilier de la prévoyance sociale suisse. Son objectif est de compenser, du moins partiellement, la diminution ou la perte de revenu dues à l’âge et au décès. En d’autres termes, la rente de vieillesse vise à permettre aux citoyens de se retirer de la vie professionnelle tout en assurant un minimum vital. Ce premier pilier est principalement financé par les cotisations paritaires des assurés et des employeurs, représentant respectivement 73% en 2022, ainsi que par la Confédération à hauteur de 20%, la différence étant comblée par la TVA et les recettes des jeux de hasard.

Votation 1 : « Mieux vivre à la retraite »

La première votation se base sur le fait suivant : lorsqu’une personne atteint l’âge de la retraite, l’AVS lui verse une rente mensuelle en fonction de ses revenus et du nombre d’années cotisées. Actuellement, la pension AVS minimale pour une personne seule s’élève à 1225 francs et la rente maximale à 2450 francs par mois pour ceux ayant cotisé toute leur vie au 1er pilier. La rente maximale pour un couple marié ou en partenariat enregistré s’élève à 3675 francs par mois.Les personnes incapables de subvenir à leurs besoins avec leur rente peuvent également bénéficier de prestations complémentaires sous certaines conditions.

Pour de nombreux retraités qui dépendent uniquement de l’AVS ou qui reçoivent une petite rente de leur caisse de pension (2e pilier), ces montants ne suffisent plus à couvrir leurs besoins. L’initiative populaire vise ainsi à améliorer cette situation en proposant l’introduction d’une 13e rente mensuelle sur le modèle du 13e salaire répandu sur le marché du travail suisse. Déposée en mai 2021 avec plus de 137 000 signatures, cette proposition précise qu’elle n’aurait pas d’impact négatif sur le droit aux prestations complémentaires, mais ne mentionne pas le financement de cette augmentation des prestations.

Selon l’Office fédéral des statistiques, fin 2022, 2,504 millions de personnes percevaient une rente de retraite de l’AVS, soit 90% des personnes âgées en Suisse. En raison du vieillissement de la population, le nombre de bénéficiaires de rentes a augmenté d’un million depuis l’an 2000. Les dépenses annuelles de ce 1er pilier atteignent 50 milliards de francs à l’heure actuelle.

Toutefois selon l’Office fédéral des assurances sociales, ces dépenses devraient atteindre 60 milliards en 2030 avec l’arrivée à la retraite de la génération du baby-boom. Si cette initiative est acceptée, les dépenses augmenteront d’environ 4,1 milliards de francs par an dès son entrée en vigueur. Selon les projections de l’OFAS, l’AVS serait ainsi en déficit à partir de 2026. A noter que, sans la 13e rente, l’AVS devrait être en déficit dès 2031.

Les partisans de l’initiative augmentent que face à l’augmentation du coût de la vie, de nombreux retraités peinent à joindre les deux bouts. De plus, cette mesure permettrait d’améliorer la situation des femmes, dont le parcours professionnel souvent interrompu les empêche de constituer des fonds de pension suffisants. Enfin, ils estiment que cette augmentation serait justifiée pour toutes les classes sociales car les personnes aisées ont généralement cotisé des montants plus importants que le montant de leur rente.

En revanche, les opposants à l’initiative – notamment la droite, le Conseil fédéral et les Chambres – estiment que cette proposition n’est pas financièrement soutenable. Le coût estimé serait trop élevé, d’environ 4,1 milliards de francs par an. De plus, ils mettent en garde contre l’insoutenabilité financière du 1er pilier à long terme, qui n’est assuré que jusqu’en 2030, nécessitant ainsi une réforme future. Ils soulignent également que cette augmentation se traduirait par une charge financière supplémentaire pour la population active, les entreprises et les consommateurs, via la TVA.

Enfin, ils contestent le fait que cette mesure est insuffisamment ciblée sur les rentiers qui éprouvent de réelles difficultés financières et qui peuvent déjà bénéficier de prestations complémentaires. Cette votation suscite donc un débat important quant à l’avenir de l’assurance vieillesse en Suisse et les citoyens seront appelés à se prononcer sur ces enjeux cruciaux pour la société.

Votation 2 : « Pour une prévoyance sûre et pérenne »

La deuxième votation vise à garantir une « prévoyance sûre et pérenne ». Cette proposition, nettement moins médiatisée et assurément plus visionnaire que celle précédemment discutée, veut assurer de manière durable le financement de l’AVS en relevant l’âge de la retraite.

En effet, à peine plus d’un an après la dernière révision de l’AVS, notamment par l’augmentation de l’âge de référence à 65 ans pour les femmes, les Suisses se rendent une fois de plus aux urnes pour décider d’un nouvel âge de retraite à 66 ans pour tous, soumis en juillet 2021 par les Jeunes libéraux-radicaux avec 145 000 signatures. Cette proposition de loi serait mise en œuvre en deux phases.

  • La première étape consisterait à augmenter progressivement l’âge de référence à 66 ans pour les hommes et les femmes d’ici à 2033.
  • Deuxièmement, il s’agirait de lier cet âge à l’espérance de vie moyenne de la population suisse à 65 ans. Concrètement, cette seconde phase serait ajustée à 80% à l’augmentation de l’espérance de vie.

Ainsi, selon l’évolution de l’espérance de vie actuelle, l’âge de la retraite serait porté à 67 ans en 2027 et à 69 ans en 2070.

D’un point de vue financier, bien que les réformes de l’AVS 21 ont permis d’assainir les comptes jusqu’en 2030, le financement des retraites à moyen terme n’est toutefois pas garanti, principalement en raison de la structure démographique de notre pays, comme mentionné précédemment, mais également en raison de l’espérance de vie. Cette mesure permettrait d’économiser 2 milliards de francs d’ici à 2030 et de pérenniser le système au moins jusqu’en 2033.

Il est important de souligner que, selon l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), l’espérance de vie était de 17 ans pour les hommes et de 20,7 ans pour les femmes après 65 ans en 2000 tandis qu’elle est actuellement de 19,8 ans et 22,5 ans selon les chiffres de 2022.

Les principaux arguments, développés par les Jeunes libéraux-radicaux, en faveur de cette proposition, reposent sur le fait qu’il est impératif d’assainir durablement le 1er pilier pour éviter la faillite de notre système de prévoyance vieillesse. Cette solution permettrait également de dépolitiser ce dossier en instaurant un calcul automatique liant l’âge de référence à l’espérance de vie. De plus, ils estiment qu’avec une vie plus longue, il est évident que nous devrions travailler plus longtemps. En conclusion, l’objectif serait de permettre aux individus de passer en moyenne 20% de leur vie à la retraite, selon la formule invoquée ci-dessus. En liant l’âge de la retraite à l’espérance de vie, celle-ci serait de 67 ans en 2043 et de 69 ans en 2070. De nos jours, le Danemark a adopté ce système depuis 2011. Le parlement vote tous les cinq ans une augmentation de l’âge de retraite allant de six mois à une année. De 68 ans actuellement, il sera à 74 ans pour les personnes nées en 1996 ; des mesures pour favoriser l’emploi des seniors danois sont également mises en œuvre régulièrement.

En Suisse, en revanche, le Conseil fédéral ainsi que les Chambres s’opposent à cette initiative car ils œuvrent à la pérennisation de notre 1er pilier entre 2030 et 2040, qu’ils devront réviser en 2026. Ils pensent que la problématique démographique ne peut être résolue uniquement par un relèvement de l’âge de la retraite et qu’un financement supplémentaire doit être ajouté. De plus, lier l’espérance de vie à l’âge de référence ne tient pas compte de la réalité des seniors sur le marché du travail ni de leur situation sociale.

En somme, un tel automatisme ne serait pas compatible avec la politique suisse, privant le Conseil fédéral, le parlement ou le peuple de la possibilité de prendre en compte d’autres critères.

Il est évident que, dans les années à venir, des décisions importantes devront être prises en matière de retraite dans le but de pérenniser notre système social.

Néanmoins, nous pouvons considérablement améliorer notre retraite en optimisant nos plans de prévoyance par le biais du 2e pilier. A cet effet, il est intéressant d’interroger votre représentant au sein de la caisse de pension, généralement indiqué sur votre certificat de prévoyance, ou de solliciter directement votre employeur.

Depuis plus de vingt ans, Argos Prévoyance SA accompagne les entreprises dans la recherche de solutions d’optimisation de leur caisse de pension, garantissant ainsi à leurs employés des prestations retraite ou prestations risques (rente d’invalidité, rente de conjoint) aux meilleures conditions.

Joel Ramos – Directeur de la Prévoyance.

Rédaction en collaboration avec la revue « Le Temps », retrouvez le journal complet ici :